Raven meets lion [Aiden & Beau]

Beau venait de finir sa première journée de cours, assis sur les bancs froids des salles de classes chauffées par le soleil de fin d'été. Comme chaque instants passés dans ce château, il en avait profité du mieux qu'il pouvait, sachant que, quelques jours plus tard, il partirait à Beauxbâtons avec la championne et d'autre élèves. Il n'avait donc que peu de temps à Poudlard avant de déjà le quitter pour un autre lieu inconnu. Pendant les cours, il avait pris autant de notes que possible, était attentif aux moindres paroles des enseignants, notant même les anecdotes dont ils affirmaient que ça ne sortirait pas aux examens. Tout l'intéressait. Pendant les pauses, il sortait un bloc de feuilles et un crayon et faisait des croquis des couloirs, des salles de classes, des professeurs et des élèves. Il voulait tout immortaliser, tout se rappeler.

Son dernier cours achevé, il retourna à son dortoir, sac sur l'épaule. Cette fois, il ne se perdit pas et trouva le chemin sans beaucoup de difficulté. Pour s'en féliciter, il piocha dans la corbeille à bonbons posée au centre de la salle commune et dégusta une chocogrenouille dont la carte représentait Philipp Von Roppelt, l'actuel directeur de Durmstrang, le collègue de sa demi-sœur. Il savait qui était cet homme, bien entendu, et se demandait ce qu'en pensait Kate. Il était dit cruel et sans cœur, dirigeant impitoyablement les Pozhiratelis. Kate était-elle en danger, si proche de cet homme, ou justement était-elle en sécurité en tant que son adjointe ? Il avait peur pour elle, alors qu'il ne la connaissait que grâce aux histoires de leur père. Il lui avait parlé d'elle, la seule sœur qu'il lui restait, et il voulait être comme elle. Forte, puissante, gentille et aimante, voilà comment François avait décrit sa fille. Elle avait fait des erreurs, certes, mais elle avait toujours fait en sorte de les réparer. Beau était fier d'être son frère.

Glissant la carte dans sa poche, il alla dans son dortoir poser son sac et changea de vêtements. Il détestait les uniformes, aussi, dés qu'il en avait l'occasion, il changeait de tenue pour un jeans et un sweat-shirt. Cette fois, il choisit un pantalon un peu usé sur les genoux et un pull à capuche à l'effigie de sa maison, fait pour que les moldus se sentent sorciers en portant ce vêtement. Lui l'avait acheté avant d'entrer au Collège, trouvant amusant de s'habiller ainsi pour sa répartition. Malheureusement, il avait dû mettre son uniforme, gâchant l'effet de sa blague.

Un casque autour du cou, son carnet de croquis et un crayon en poche, il quitta son dortoir aussi vite qu'il y était entré. Bien entendu, il savait que son casque ne diffuserait aucune musique dans l'enceinte de l'école, mais ça étoufferait les bruits ambiants, lui permettant de se concentrer sur ses dessins. Sortir du château fut aisé, il n'avait qu'à descendre les escaliers et prendre la grande porte pour se retrouver dans le parc. Il marcha longuement, à la recherche de l'inspiration, d'un lieu à immortaliser dans son carnet. Il le trouva alors qu'il traversait le pont suspendu : le lac était sous ses pieds, reflétant la forêt Interdite sur sa surface miroitante.

Il s'assit de façon à avoir un bel angle de vue entre deux barres de la rambarde, cala son casque sur ses oreilles et entama son croquis au crayon gris. Le soleil baissait déjà ; il devrait faire vite s'il voulait achever son dessin avant qu'il fasse nuit.

Beau en était à la moitié de son dessin quand la visibilité commença à réduire fortement. Le soleil, pas encore couché, s'était caché derrière de hauts arbres qui absorbaient sa luminosité de façon à ce que le jeune artiste ne puisse plus voir ce qu'il traçait sur sa feuille. Bien que la manœuvre ne fut pas évidente, il sorti sa baguette et lança un lumos, ce qui l'obligea à tracer plus délicatement, sa main gauche ne tenant plus le cahier. Le lac, lui, était encore assez éclairé pour que Beau puisse le voir ou deviner les lieux plus sombres.

Quelques minutes plus tard, une ombre vint s'étaler sur son cahier et Beau se retourna en sursautant. Quelqu'un se tenait derrière lui. Il cru d'abord que c'était le concierge qui venait le rappeler à l'ordre, ou un directeur ou professeur qui allait le ramener à son dortoir, mais ce n'était qu'un étudiant. Un Gryffondor, à en croire son uniforme, le regardait en souriant, comme s'il attendait qu'il prenne la parole. Réalisant qu'avec son casque sur les oreilles il n'avait pas entendu l'autre lui parler, Beau le retira précipitamment.


Il sourit à sa plaisanterie puis se tourna brièvement vers le lac pour constater avec désappointement que le soleil était sur le point de se coucher. Dans quelques secondes, il n'y verrait plus rien, et son dessin était loin d'être achevé. Il referma son cahier et, avec son crayon, indiqua sur la pierre du pont où il se trouvait pour garder le même angle de vue la prochaine fois qu'il viendrait là. Puis il se leva et remis cahier et crayon dans ses poches arrières.


Si vingt-deux heures pouvait être considéré comme tard par certains, Beau n'allait jamais dormir à cette heure-là. En général, il se plongeait dans un livre ou un dessin qu'il ne finissait que vers minuit et était donc habitué aux nuits courtes mais reposantes. Mettre un couvre-feu si tôt lui paraissait strict, mais il n'avait d'autre choix que de le respecter.

D'après le Gryffondor, il leur restait encore une heure avant le couvre-feu, ce qui fit pester Beau. Si le soleil ne s'était pas déjà couché, il aurait largement eu le temps de finir son croquis et de retourner à sa salle commune avant d'être obligé de se mettre au lit. Heureusement pour lui, il était seul dans son dortoir, aussi il ne dérangerait personne en lisant encore un moment. Ou en essayant de finir son dessin de tête, ce qui était plutôt risqué ; un seul mauvais trait et il devrait tout recommencer depuis le début.

Aiden se présenta à lui et Beau serra les dents pour ne pas lui révéler qu'il savait déjà comment il s'appelait... ni qu'il avait déjà fait un croquis de lui la veille au déjeuner. Il avait ensuite entendu la championne l'appeler et avait vite inscrit son nom sous le portrait pour s'en rappeler. Il ne valait mieux pas qu'Aiden l'apprenne, il le prendrait pour un malade qui l'espionnait ou un psychopathe du genre.


Mal à l'aise et le rouge aux joues, Beau serra la main d'Aiden avant de la mettre en poche. Il n'aimait jamais se présenter aux gens. Soit on le prenait pour un prétentieux du style "pas besoin de connaître mon prénom, sache juste que je me trouve beau" soit on se moquait de lui. Non, sa mère n'avait pas fait un choix judicieux en le nommant ainsi, elle l'avait condamné à une vie d'embarras et de moqueries.


Lui-même n'en avait encore aucune idée. Il ne connaissait personne, venait à peine d'arriver à Poudlard et on lui demandait déjà de partir pour un autre endroit tout aussi inconnu. Et loin de chez lui, c'était ça le pire. Après, s'il parvenait à se faire un ami qui irait à l'Académie, il le suivrait peut-être, d'autant qu'il avait entendu que plusieurs professeurs partaient ; il n'aurait donc pas tous les cours, ce qui serait embêtant.

Beau fut étonné d'entendre Aiden dire qu'il s'était préparé pour le tournoi et qu'il avait mis son nom dans la coupe de feu. Lui qui croyait que seuls les fous ou les gens en quête d'attention faisaient ce genre de choses, il se remit en question. Aiden ne semblait pas fou ni désespéré au point de faire ça. Peut-être qu'il y avait une troisième raison qui poussait les gens à s'inscrire à ce genre de mission suicide, une raison qui échappait totalement au Serdaigle.


Beau haussa les épaules puis se tourna de côté pour entamer son retour vers le château. L'heure avançait et, si ils restaient là, les deux garçons se verraient collés quelques heures. Il valait mieux poursuivre cette conversation en marchant.


En lisant ces articles, d'ailleurs, Beau s'était senti un peu jaloux et, l'espace d'une seconde, en avait voulu à sa mère de l'empêcher de partir. Il aurait du y aller, lui aussi, suivre les cours avec des professeurs étrangers, manger des chamallows autour d'un feu. Puis il s'était rappelé que c'était sa décision de rester pour veiller sur sa mère et sa colère était retombée aussi vite. A présent, il voulait juste savoir comment c'était - peut-être alors qu'il réaliserait qu'il n'avait rien raté.

Beau écouta avec attention et admiration le discours du Gryffondor, de plus en plus déçu de ne pas avoir pu s'y rendre. Son imagination tournait à plein régime et il regretta de ne pas avoir pu dessiner tout ça. Ce devait être fabuleux, fantastique et tellement amusant ! Il aurait pu voler sur des chevaux ailés et ne pas se contenter du balais qu'il maîtrisait à grand peine... Oui, ça avait du être bien.

De plus, il se douta que sa demi-soeur avait du s'y rendre, étant directrice adjointe de l'Institut Bulgare. Même s'il avait prévu de la rencontrer quelques années plus tard, il aurait adoré pouvoir être près d'elle, voir si elle était aussi belle, aussi gentille et caractérielle que leur père lui avait dit. Peut-être même qu'il leur aurait trouvé des airs de familles, des points communs.


Un peu démoralisé, Beau garda le silence pendant quelques pas, le regard fixé sur le château qui grandissait à mesure qu'ils approchaient. Cette description de ce qu'il avait manqué l'année précédente l'aida à prendre une décision. Il ne voulait pas passer à côté d'un autre événement, d'un autre décor et d'une opportunité de voir Kate autrement qu'en photo.